Histoire des radios francophones du Canada. Les débuts de la radiodiffusion au Canada remontent à l’année 1919 et sont dus à l’initiative du secteur privé. C’est la “Canadian Marconi Company” qui avait obtenu du gouvernement canadien le droit de construire des stations d’émission avant la première guerre mondiale, qui va lancer une première émission expérimentale à Montréal le 1er décembre 1919. La station émet en anglais sous le nom de XWA.
Les années 20.
Mais c’est à partir du 20 mai 1920 que cette émission va devenir régulière. Puis, le 4 novembre 1920, XWA change de nom pour s’appeler CFCF. Elle émettra sous ce nom jusqu’en 1991. Puis elle changera encore de nom (CIQC et CINW) pour arrêter définitivement ses émissions en 2010.
Depuis les années 20, au Canada, on identifie les licences d’exploitation des radios par un indicatif d’appel. A ce titre, l’Union Internationale des Télécommunications attribue la première lettre pour chaque pays. Pour le Canada, c’est le “C” et les préfixes de 2 lettres reconnus furent : CF, CH, CJ, CK suivis de 1 ou 2 autres lettres qui identifient la station. En revanche, ces indicatifs n’empêchent pas la station d’avoir en plus un nom commercial, mais seul son indicatif a une valeur pour l’administration.
A partir de 1922 ce sont donc des initiatives privées qui vont être autorisées et construire des émetteurs et des stations à travers le pays mais sous un régime de licences accordées par les pouvoirs publics et assorties d’un certain nombre de contraintes : encadrement strict de la publicité, censure sur les contenus, limitations de la puissance. Ainsi, une soixantaine de licences vont être accordées dans les années 20. Ce sont des industriels comme Marconi, Dupuis Frères, Northern Electric mais aussi par des passionnés de radio, des groupes de presse et des universités qui les détiennent.
La première radio francophone
C’est en 1922 que nait la première radio francophone du pays : CKAC à Montréal. Elle est due à l’initiative du journal francophone « La Presse ». CKAC va proposer un véritable programme qui allie divertissement, information, culture.
Les années 30.
Dans les années 30, devant la constitution de réseaux qui représentent un danger d’hégémonie de certains groupes privés, d’autant que certains réseaux sont infiltrés par les réseaux des radios des État-Unis, le gouvernement canadien décide de constituer une radio d’État. A cet effet, il crée la Commission Canadienne de Radiodiffusion (CCR). Elle a pour objectif de constituer un réseau national en créant de nouvelles stations mais surtout en rachetant des stations privées. En 1936, elle devient une société de radiodiffusion à part entière et prend le nom de Société Radio Canada (SRC) / Canadian Broadcasting Corporation (CBC) ou plus simplement « Radio Canada ». A cette époque 75 stations émettent à travers le pays (contre 650 stations aux USA). La radio d’État a constitué un réseau de stations bilingues mais sans avoir mis fin au secteur privé qui continue de se développer. Elle a aussi mis en place des contrats d’affiliation avec des stations privées qui complètent son réseau.
En 1937, une des initiatives de Radio-Canada est de dissocier le programme français du programme anglais.
Réseau francophone d’État.
CBF va devenir la station francophone qui va constituer son propre réseau d’émetteurs en ondes moyennes (CBF-AM). Au même titre, CBM sera la tête de station du réseau anglophone.
CBF est aujourd’hui encore l’indicatif de « Ici Première » la première chaine de Radio Canada en langue française.
Les années 40.
Dans les années 40, avec l’implication du Canada dans la seconde guerre mondiale dès 1939, la radio va assurer un rôle stratégique dans la guerre des ondes non seulement à destination de l’extérieur mais surtout de l’intérieur. En effet, l’unité nationale est nécessaire, d’autant que les canadiens francophones n’ont pas la même volonté que les anglophones d’impliquer le pays dans la guerre en Europe. A la veille de la guerre le pays compte 78 stations publiques et privées. En revanche, le réseau francophone n’est présent géographiquement que sur la province du Québec. Radio-Canada possède 3 stations au Québec : CBF, la tête de réseau à Montréal, CBV à Québec et CBJ à Chicoutimi. Mais des stations privées affiliées retransmettent son programme et constituent le reste de son réseau. Certaines vont être rajoutées au réseau entre 1939 et 1945 mais elles ne dépasseront pas la dizaine de stations. Par ailleurs, le Québec compte également à cette époque des stations 100 % privées concentrées essentiellement à Montréal et à Québec. L’historique CKAC est de loin la principale radio privée francophone de Montréal. Mais une autre privée émet sur cette ville : CHLT. A Québec, les deux stations privées sont CHRC et CKCV. Enfin, deux autres stations privées se situent entre les deux villes. La censure et le contrôle des agences de presse vont se renforcer.
Les Ondes courtes.
Depuis 1941, une station Ondes Courtes diffuse aussi le programme français à destination des régions francophones éloignées de l’Ouest : Windsor en Ontario et Saint Boniface au Manitoba. Mais le Canada souffre de l’absence d’une grande station Ondes Courtes à destination de l’Europe. C’est pourquoi, il est obligé de passer par la radio américaine ou la BBC anglaise pour faire entendre sa voix en Europe. Ce n’est qu’en 1945 que Radio Canada va créer un service international en Ondes Courtes qui deviendra « Radio Canada International » (RCI) en 1972.
L’après guerre.
Enfin en 1946, la première station francophone hors du Québec va aussi être créée à Saint Boniface au Manitoba. C’est aussi en 1946, 10 ans avant l’Europe, que la modulation de fréquence va faire son apparition au Canada et va se développer durant les années 50 et 60, remplaçant progressivement les émetteurs AM.
Les années 50.
Les années 50 ne vont pas connaître de grands changements dans la structure de la radio canadienne, à part l’apparition de la télévision en 1952 qui va aussi dépendre de Radio-Canada. Cela aura pour conséquence de canibaliser une grande partie du budget alloué à la radio au profit de la télévision. Aussi, durant les décennies qui suivront, la radio d’Etat va souffrir de coupes budgétaires importantes qui vont affaiblir son réseau, réduire son personnel et nuire à la qualité de ses programmes.
Les années 60.
Dans les années 60, on assiste à une montée en puissance des radios privées francophones qui doivent compenser les carences de Radio-Canada. C’est pourquoi, des groupes puissants vont se constituer. En 1967, le réseau Radiomutuel est constitué avec CJMS en tête de réseau. Puis, en 1968, c’est la grande radio privée de Montréal CKAC qui constitue le principal réseau concurrent : Télémédia. D’autres réseaux vont également se constituer ce qui laissera peu de radios indépendantes.
C’est aussi en 1968, année où les pouvoirs sont contestés dans de nombreux pays, qu’est créé le CRTC : Conseil de la Radiodiffusion et des Télécommunications Canadiennes (en anglais, Canadian Radio-television and Telecommunications Commission). Cet organisme indépendant du pouvoir se charge de règlementer et réguler la radiodiffusion. Mais il faudra attendre les années 80 pour que de tels organismes apparaissent en Europe.
Les années 60, 70, 80.
Dans les années 70, 80 et 90, contrairement à l’Europe qui va connaître une mutation profonde de son offre radiophonique, le Canada et la Province du Québec ne vont pas connaître de révolution audiovisuelle. En effet, les réseaux privés vont continuer à se renforcer et à se concentrer. Néanmoins, des radios communautaires vont se développer dans les années 70 et se regrouper en associations. Ainsi, elles répondent à un besoin exprimé de donner la parole aux minorités. Puis le réseau Cogeco va se constituer en 1986 et dans les années 90 les regroupements, rachats de réseaux vont se poursuivre. Ainsi les réseaux d’émetteurs AM de Télémédia et de Radiomutuel vont fusionner pour créer le réseau Radiomédia. Cela va entrainer la fermeture de stations doublons et d’importants plans de licenciements. Puis les années 90 voient aussi l’abandon progressif des émetteurs AM au profit de la modulation de fréquence.
Les années 2000.
A l’aube des années 2000, à côté de Radio-Canada qui s’est peu à peu restructurée, 3 principaux groupes privés dominent le marché de la radio : Corus Québec, Cogéco et Astral Média qui a racheté Télémédia, Radiomédia et Radiomutuel.
Les années 2010
Dans les années 2010 Corus vendra toutes ses parts à Cogéco. Aussi ne subsisteront que deux importants réseaux privés :
Cogéco avec 13 stations –
Astral avec 84 stations de radio dans 8 provinces, plus des chaines de télé.
Comme partout, l’apparition des webradios va introduire un nouvel acteur dans le paysage radiophonique mais sans présenter encore une menace commerciale sérieuse pour les réseaux constitués. Les webradios vont surtout permettre de segmenter un peu plus le marché par une offre très ciblée notamment en direction des minorités.